Comprendre, anticiper et gérer les risques sanitaires associés aux migrations climatiques

François Gemenne
Politologue et chercheur, spécialiste des politiques du climat et des migrations internationales, auteur principal du 6e rapport du GIEC

Dans cet entretien, François Gemenne aborde les défis spécifiques que rencontrent les déplacés climatiques, souvent différenciés à tort des déplacés économiques. Ces migrations résultent de catastrophes immédiates (tempêtes, inondations...) et de changements progressifs (hausse du niveau des mers, dégradation des sols...), qui accroissent la vulnérabilité de certaines régions. Les problèmes de santé, qu’ils soient physiques ou mentaux, sont omniprésents à chaque étape du parcours de ces réfugiés ; de la survenue d’une catastrophe à leur arrivée dans un pays d’accueil, et de surcroît quand les déplacés climatiques sont des femmes. Construire des politiques d’adaptation et de gestion de ces nouveaux flux implique la prise en compte de facteurs subjectifs ; la perception des effets du changement climatique pèse souvent davantage dans le choix de partir que la réalité objective. La santé, associée à des facteurs « push » (qui poussent à partir – tels que l’apparition de nouvelles maladies) et des facteurs « pull » (qui attirent les déplacés vers certains endroits – par exemple l’accès aux soins), s’imbrique dans un ensemble complexe de facteurs motivant le départ. Face à ce constat, les Etats peuvent choisir d’envisager et organiser ces flux comme une « stratégie d’adaptation » plutôt que de les appréhender comme un « échec d’adaptation ». La migration peut en effet améliorer la santé et la sécurité des personnes déplacées, mais aussi plus largement celles des pays d’origine et d’accueil.